Prendre le temps
Je marchais tranquillement dans le métro parisien et je me suis rendu compte que je m’étais mis au rythme des autres voyageurs, à marcher vite alors même que je n’étais pas particulièrement pressé…
J’ai presque dû me forcer à ralentir, à prendre le temps, me faisant parfois bousculer par les autres voyageurs pressés et je me suis surpris à me dire qu’en fait, prendre son temps demandait un effort.
Que nous ayons du temps, ou que nous pensions ne pas en avoir, notre environnement nous pousse à aller vite…
C’est un constat dans le métro parisien mais cela l’est également dans notre société occidentale.
Nous voulons, nous devons allez vite pour tout : accéder au marché de l’emploi, se mettre en couple, avoir des enfants, acheter une maison, etc… Rien ne vient assez rapidement.
Cette accélération se fait souvent au détriment de la qualité.
Nous pouvons le constater dans le bâtiment : alors que nos ancêtres pouvaient se lancer dans des constructions de plusieurs décennies, voir de plusieurs générations, aujourd’hui les immeubles sortent de terre comme des champignons, le plus souvent avec de nombreuses malfaçons… mais tant que les délais sont respectés cela ne pose pas de problèmes. Que restera-t-il des constructions contemporaines dans 100 ans ?
Ce besoin d’aller vite se retrouve dans tous les domaines, y compris le développement personnel.
Il faut que les choses aillent vites, il faut « s’éveiller », ouvrir son troisième œil, se connecter la source le plus rapidement possible. Et donc, on essaie différentes méthodes, différentes techniques dans l’espoir d’un résultat immédiat et puis si cela ne fonctionne pas ou ne va pas assez vite, on zappe et on passe à la suivante…
Parfois, on a des ouvertures fulgurantes ; est ce lié à la méthode ou était ce simplement le bon moment ?
Pouvons-nous nous construire à la va vite, comme nous construisons des immeubles ?
J’aurai plutôt tendance à regarder ce que faisaient nos ancêtres et dire qu’il faut du temps et notamment qu’il faut commencer par aller creuser au plus profond de nous pour y trouver nos racines, les fondations sur lesquelles nous pourrons nous élever et construire quelque chose de solide.
Mais ce travail nécessite du temps… Il faut du temps intégrer chaque initiation, chaque exercice, chaque rencontre. Prendre le temps de sentir la manière dont cela résonne en nous, ce que cela vient faire bouger, évoluer, transmuter avant d’envisager de continuer à avancer sur ce chemin ou d’en choisir un autre…
Cela ne peut pas se faire spontanément, il faut du temps….
Alors oui, c’est frustrant ! Parfois, nous avons le sentiment de ne pas avancer, voir même de régresser…
Parfois, nous avons des réflexions de tierce personne qui ne comprenne pas comment nous pouvons perdre notre temps ainsi…
Parfois nous aimerions bien que tout arrive demain…
Mais finalement pour en faire quoi ? Quel est le but, la finalité recherchée ?
Est-ce la destination ou le chemin qui est important ? Et si c’est le chemin, alors à quoi sert de vouloir prendre des raccourcis ? Est-ce que vraiment, ils nous permettront d’avancer plus vite ? N’est pas seulement d’autres chemins qui sont choisis ?
Alors oui, certains se disent qu’ils ont besoin d’aller au bout de telle initiation, de faire un nombre important de formation avant de se lancer dans quelque chose pour être légitime… mais légitime aux yeux de qui ?
Lors de mon initiation des Trois Cercles, nous avons eu le plaisir de rencontrer des hommes médecines africains qui ont pu partager un peu de leur sagesse et une phrase m’a particulièrement marqué : qu’il ne faut pas attendre pour offrir au monde ce que nous avons à lui offrir aujourd’hui.
Ce que nous avons à offrir n’est peut-être pas aboutit, ce n’est peut-être pas ce que nous souhaiterions mais si nous attendons d’atteindre une forme de perfection, nous ne ferons jamais rien. Car plus on avance, plus on mesure notre ignorance face à l’immensité de l’univers et notre imperfection en tant qu’être humain. En cela nous pouvons faire honneur à Socrate avec sa citation : « Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien… ».
Et c’est la que nous rentrons dans toute la subtilité de la chose : Prendre son temps, accepter que tout n’arrive pas tout de suite, ne signifie pas pour autant de ne rien faire.
Les fleurs ne poussent pas si nous ne les plantons pas. Par contre, quand on plante une graine, il faut des années avant de pouvoir profiter de l’ombre de l’arbre que la graine va devenir et tout au long de sa croissance, il faut en prendre soin… Si parce qu’il ne pousse pas assez vite, nous retournons la terre pour planter un nouvel arbre, nous ne pourrons jamais profiter de l’ombre…
Ne cherchez pas à aller trop vite, à prendre des raccourcis… Prenez soin de vous, offrez au monde ce que vous êtes maintenant, et accepter que ce que vous plantez en vous mette du temps à germer.